La colère de Banshee

Ha, David Sala et Jean-françois Chabas… de toutes leurs collaborations que j’ai pu voir jusqu’à présent, et même si l’on ne peut pas à chaque fois ( voire pas du tout..?) parler de révolution ou de militantisme,  il y a toujours un personnage féminin intéressant.  Et en plus c’est vraiment,  vraiment beau.

 

J’espère que rien n’ira contredire cela une fois que j’aurai enfin remis les pieds à la bibliothèque. Vous avais-je déjà confié que j’étais à un salon du Livre, et qu’ était présent David Sala en dédicace ?  Que les dites dédicaces étaient si soignées que la file se prolongeait sur des kilomètres ?  Et que du coup votre humble servante s’en est allée loin, loin, son album de Féroce tout neuf à la main,  en se disant bah,  tant pis ? Quelle erreur mes ami-es, quelle erreur.

 

La Colère de Banshee donc,  c’est  un très beau livre qui nous conte l’histoire de la colère… de Banshee.  Banshee qui,  d’un pas léger et délicat comme celui d’un lièvre ou d’un lutin,  foule l’herbe des landes de ses menus pieds nus. Seulement…

Banshee est si furieuse que sa chevelure se tend, s’étire, comme une auréoles tremblant autour de son visage.

 

 

Banshee se consume de rage. Elle erre sur les côtes Irlandaises,  arrache les rochers, ravage les flots, soulève les vents. Les poissons, les oiseaux, les marins eux mêmes tremblent face à ce souffle  de rage qui balaie tout sur son passage.  Jusqu’à ce qu’enfin,  le cri de fureur de Banshee jaillisse de ses lèvres et traverse l’océan.

 

C’est un hurlement si incroyable,

qu’il se rit du vent et des vagues,

qu’il file au dessus des flots,

comme une flèche stridente.

C’est alors qu’une voix s’élève. Banshee se retourne. Sa mère est là, et lui tend sa poupée qu’elle croyait égarée.

 

Banshee prend, dans ses bras, sa poupée chérie.

Et ses cheveux blonds coulent à nouveau sur ses petites épaules. Et ses yeux cessent d’étinceler comme des étoiles.

Elle sourit.

 

S’en est fini de la colère de Banshee. Le vent, la mer, le ciel, tous s’apaisent, et les marins se réjouissent d’être toujours en vie. Banshee et sa mère s’en retournent au palais de cristal pour le petit déjeuner.

Mon bébé, lui dit sa mère(…), je trouve que tu exagères un peu. Tu n’as pas très bon caractère…

 

Et voilà…

Alors, que penser ?  J’ai lu deux fois la Colère de Banshee à plusieurs mois d’intervalle. La première fois, la fin m’avait scandalisée : évidemment, ça ne pouvait être qu’une histoire de poupée ; forcément, on reproche toujours à la petite fille qui s’exprime son mauvais caractère.  Et tout se déploiement de colère poétique pour en arriver là ?  Une très grande déception, d’autant que j’étais (et suis encore) sous le charme de Féroce.

 

Et puis la seconde fois, je me suis dit que dans le fond, pour un enfant, une poupée ou un doudou c’est tout. Que la colère, ça peut naitre d’une toute petite chose pour nous, et que celle d’un-e enfant est d’autant plus puissante. Que la rage d’une petite fille, oui, ça peut  déchirer des montagnes et provoquer des raz-de-marée. Donc finalement, c’est un très bel album qui  comme beaucoup d’autres traite de l’expression de la colère chez les petit-es. Les illustrations sont très travaillées ( Banshee est en fait en surimpression dorée). On retrouve ça et là des touches d’autres artistes de tous horizons et de toutes époques ;  des couleurs à la fois sombres et étrangement flamboyantes…

Note de l’auteur:

Chers lecteurs, en Irlande, pays des enchantements, la banshee est la plus puissante des fées. La reine des magies, des malédictions, de toutes les merveilles. Aucun homme, pas même un druide, ne peut lutter contre ses pouvoirs.

Je suis à ma grande honte tombée dans un piège : croire que dès que c’est très élaboré, ce n’est pas vraiment pour les enfants. La colère de Banshee est beau, et il est  fait pour tout le monde. Avec le recul, je trouve que la réaction de la mère de Banshee est finalement très tendre.  Seul le texte manque de force à mon avis, par moment. C’est en tout cas intéressant de voir à quel point le jugement que l’on porte sur une œuvre peut être subjectif, et dépendre de tout ce que l’on a intériorisé, vécu,  jugé auparavant,  ainsi que de notre sensibilité du moment.

Quoiqu’il en soit, voir que l’on représente la colère titanesque d’une fille, une colère  née  pour une raison qui tient moins du caprice que d’un petit manque de patience,  ça me change et j’apprécie.

A moins que ma première impression ne soit la bonne…?

 La colère de Banshee, Jean-François Chabas et David Sala, Casterman (2010)

Les illustrations de cet article sont encore une fois en majorité issues du site de David Sala qui les propose en téléchargement. Ce que, encore encore une fois, je trouve vraiment très classe.

 

A suivre: soit A Calicochon ( a vous donner des frissons), soit La guerre des clans. oui non mais, il faut que jevous parle de la guerre des clans. Non mais vraiment quoi.

Un commentaire

  1. Je le veux!!!
    Suis à fond pour ta deuxième interprétation, l’opposition entre la majesté de la colère et le modestie de son déclencheur est parlante…
    Maintenant pour être plus réaliste il faudrait remplacer la poupée par le vieux reste de tartine que Banshee-Clément n’a pas voulu il y a une heure et que j’ai eu l’audace de faire mine de jeter ; quelque chose me dit que ça se prêterait moins aux jolis dessins du Monsieur.

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